Compliqué à aborder aussi bien dans la sphère intime que professionnelle, le cancer masculin fait encore l’objet de tabous particulièrement tenaces. Dur dur pour les hommes atteints d’un cancer d’évoquer cette maladie, en particulier lorsqu’elle touche leurs organes génitaux… Heureusement, les associations se bougent pour libérer la parole des hommes et sensibiliser l’opinion publique. Et ça marche !

Cancer masculin : la virilité malmenée

Parce qu’il engage très souvent le pronostic vital, le cancer est une maladie qui fait peur. Dans l’imaginaire collectif, il est aussi synonyme d’affaiblissement et de transformations physiques parfois très ingrates. Bref, un véritable parcours du combattant, capable de laisser un super-héros sur le carreau ! Pas facile à assumer dans une société où un homme, un vrai,  se doit d’être fort, viril, et performant… Alors, quand le cancer s’attaque aux organes de la sexualité et de la procréation, la situation peut s’avérer franchement difficile à assumer. Parler de sa maladie est spécialement ardu pour les hommes souffrant de deux cancers en particulier.

• Le cancer de la prostate : avec plus de 50 000 nouveaux cas par an, c’est pourtant le cancer le plus fréquent au sein de la population masculine française.
• Le cancer des testicules : loin d’être anodin, il représente la première cause de cancer chez les hommes de 15 à 35 ans. Ce cancer est particulièrement difficile à encaisser puisqu’il implique souvent l’ablation d’un testicule (orchidectomie).

Le déni des premiers symptômes ou le silence radio que certains malades peuvent observer sur leur cancer ne leur apportent aucun bénéfice, bien au contraire. Vous avez peur que votre maladie change le regard que vos potes, votre compagne ou votre compagnon portent sur vous ? C’est le moment de faire confiance à vos proches, le cancer n’est pas une maladie honteuse ! La prise en charge de votre maladie n’en sera que plus efficace.

Sensibiliser l’opinion publique sur le cancer masculin

À l’image d’Octobre rose pour les femmes, des actions se mettent en place pour sensibiliser à la cause des cancers masculins et ouvrir le dialogue sur ces thématiques. Vous avez sûrement entendu parler de la fondation Movember ? Créé en Australie, ce mouvement international incite les hommes à se laisser pousser la moustache durant tout le mois de novembre. Leur but : sensibiliser leur entourage et lever des fonds pour “sauver des bros” en finançant des centaines de projets autour de la santé des hommes dans le monde. Movember s’attaque prioritairement à la lutte contre le suicide masculin, et contre le cancer de la prostate et des testicules. Ces actions au ton humoristique un peu décalé nous parlent bien et permettent de faire parler de nous ! Main dans la main avec l’association Cerhom, la fondation a réalisé une série de courts-métrages à visée préventive très réussis. Coup de la panne et Un vrai film de boules abordent ces sujets touchy avec beaucoup d’humour, pour inciter les hommes à “prendre soin de leur matériel” !

Avec le #Parlonsfesses, la Ligue contre le Cancer prend elle-aussi le pari d’un titre osé pour dédramatiser le dépistage du cancer colorectal, le deuxième cancer le plus meurtrier pour les hommes. La campagne est lancée chaque année dans le cadre de Mars bleu et vise à libérer la parole sur les éléments tabous du dépistage. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :

S’il est détecté assez tôt, le cancer colorectal peut être guéri dans 9 cas sur 10 !

Faire bouger les lignes et attirer l’attention sur les cancers des hommes tout en les informant… C’est aussi la mission de Balafres, notre site destiné à aider les hommes à mieux vivre leur cancer au quotidien.

Parler du cancer masculin autour de soi

Alors, est-il vraiment indispensable de parler du cancer autour de nous ? La réponse est, évidemment, affirmative !  Sans faire des tonnes de blabla, s’ouvrir aux autres et parler de sa maladie est une étape cruciale sur le plan personnel :

• Dire, c’est se libérer du fardeau qu’on porte depuis la suspicion et le diagnostic de notre cancer. Un poids trop lourd à porter, une surcharge d’émotions dont il faut pouvoir se soulager rapidement. Le stress, la peur, le doute reviennent par vagues et ne préviennent pas toujours de leur arrivée. Parler de ses émotions permet aussi de mieux les appréhender. Vos amis, votre famille sont là pour dialoguer !
• Dire qu’on est malade, c’est donner l’opportunité à notre entourage de prendre conscience de nos difficultés et de se mobiliser avec nous. Alors, n’attendez pas pour annoncer votre cancer à vos proches et constituer votre dream team. Ils vous aideront à vous battre au quotidien, vous apporteront l’énergie qui vous manque pour vous rebooster quand vous êtes prêt à flancher. Ils partageront avec vous les moments difficiles mais aussi les grandes victoires ! Bien souvent, l’ignorance est source d’inquiétude : parlez à vos proches pour les informer du protocole et des soins dont vous êtes l’objet, afin de les rassurer.
• Dire permet de ne plus cacher ses balafres, d’assumer pleinement cet état et d’aider votre entourage à voir les choses avec réalisme. Si vos proches ne sont pas réceptifs à votre besoin de dialogue, il existe des structures dédiées. N’hésitez pas à les contacter !

En évoquant notre maladie avec les personnes qui nous entourent en famille, au travail ou entre potes, nous contribuons à déboulonner des tabous ancrés depuis la nuit des temps. Assumer ses balafres sans pour autant les exhiber, parler de son cancer sans faire de grands discours moralisateurs… Cela représente une incroyable opportunité d’ouvrir le dialogue sur ces maladies dont on ne parle pas assez, par honte ou par pudeur. Un argument de poids lorsqu’on sait que 40% des cancers peuvent être évités en limitant les facteurs de risques, en ayant une vie saine et active et en effectuant les actions de dépistage appropriées !

Sabine André